Cela commence à faire bien longtemps que je n'ai posté aucun texte. Alors je me rattrape avec un compte-rendu de mon dernier atelier d'écriture :
D'abord, le texte à faire chez soi.
Observation : dans un café, 15 – 20 min, décrire une scène qu’on observe :
L’heure creuse
L’endroit est plein de charme : un vieux café parisien qui doit dater d’entre-deux guerres, très bien restauré, à l’angle de deux rues dans le quartier Pelleport. Les dominantes colorées sont le rouge et le crème, et des pointes de vert olive viennent ponctuer l’espace. Le noir des tableaux présentant les prix et les menus, anime la pièce d’une littérature à main levée à l’esthétique surannée mais rassurante.
De là où je me suis installée, je peux facilement observer le ballet des serveurs (ce soir il n’y a que des hommes au service) qui vont et viennent de la cuisine au comptoir, du comptoir à la cuisine, ou qui slaloment entre les tables, qui déplacent, replacent, rangent, réarrangent, servent, desservent, font tinter les verres, accueillent les habitués de cordiaux « Bonsoir ! Comment ça va ? ». Il est presque 19h. L’un d’entre eux s’assied à la grande table centrale muni d’une ardoise et d’un feutre-craie, et rédige, concentré, le menu du jour. C’est l’heure de préparer le premier service. Il doit être responsable car une fois le menu accroché, il commence à briefer un jeune serveur sur les réservations du soir et l’organisation des tables. « Une table de sept ici, ces deux là peuvent êtres séparées pour les couples, la grande est prête pour 21h… ».
Dans un coin à droite, un autre espace-temps s’offre à ma vue. Un jeune homme seul à une table est assis dans une quasi immobilité, un magazine sous les yeux. De temps en temps il tourne une page, il ne boit ni ne mange, il doit sans doute attendre, et comme moi il observe. Il m’a vue et m’a lancé le regard de complicité des solitaires contemplatifs. La valse du service bat son plein autour de nous, profitant de l’heure creuse pour achever la métamorphose du café en restaurant. Les clients du pot de six heures quittent les lieux dans un concert de crissements de chaises, de tintement de tasses et de froissements de manteaux, alors que quelques badauds s’arrêtent devant la vitre, hésitant à entrer pour souper. L’autre et moi-même, sommes comme des rochers émergeant de la rivière : seuls éléments fixes du décor. Nous sommes le calme dans la tourmente, l’œil du cyclone, la sagesse méditative incarnée. Nous somme les yeux qui voient pour prendre la mesure des choses, alors que tout s’agite dans une semi inconscience. Soudain le rocher s’anime, l’homme se lève, ferme son magazine, se retourne, ses yeux se remplissent d’intention, son visage prend forme sociale, il sourit. Une femme vient d’arriver, sans doute celle qu’il attendait. Il l’invite à s’asseoir, reprend place lui aussi, et ils commencent à converser, entrent dans la valse et sont emportés dans l’effervescence alentour. Comme je l’observais du coin de l’œil, il remarque l’intérêt que je lui porte et je me rends compte qu’il risque de mal l’interpréter. Je détourne le regard, regarde ma montre. Le temps de l’exercice est écoulé, j’ai fini mon café, je prends mes clics et mes clacs et je quitte le troquet.
Pendant la séance :
Consigne : improvisation à partir d'une photo :
C'est une histoire de rythmes, de tonalités. La musique de Paris. C'est aussi le dédale, le labyrinthe. Se perdre, monter, descendre, le près, le loin. Enfin c'est l'espace. Je me blottis, je tends le cou et je vois une portion de ciel entre deux arches. C'est minéral, c'est une architecture. Je saute de marche en marche jusqu'aux toits de Paris, ce sont des symboles forts qui nous crient "Ah Paris !", un camaïeux de gris, des chauds, des froids, car cet endroit n'est que valeurs. Comme une vieille carte postale, Paris est tons de gris, ombres et lumières, l'eau qui court, la pierre, le fer.
Consigne : dialogue entre deux personnages inventés par le groupe :
- un enfant, 12 ans, rêveur / dans la lune, Lancelot, un peu rondouillet, menteur, dessine bien.
- un homme, 75 ans, Valentin, jovial, grand mince, illettré, en confiance.
V - Ha bah ça alors ! Mais comment as-tu fait pour monter là-haut, petit ?
L - Par la fenêtre, la grosse branche passe juste devant ma chambre. Ici c'est ma base secrète.
V - Et t'as pas peur de tomber, dis-donc ?
L - Impossible ! Ma cabane, c'est moi qui l'ai faite, et c'est du solide, croyez-moi.
V - N'empêche, chuis pas tranquille. Ta maman sait que tu es là-haut ?
L - Mais oui, bien sûr, elle me laisse faire ce que je veux de toutes façons.
V - (dans sa barbe) Et s'il t'arrive quoi que ce soit, c'est moi le responsable...
(haut) Tu sais que je suis le gardien de l'arbre de la cours, petit ? Pour avoir le droit d'y monter sans que je ne le dise à personne, il faudra me faire une faveur.
L - Hum hum, laquelle ?
V - Il faudrait me lire le journal à 5h30 quand tu rentres de l'école.
L - Han... j'aimerais mieux te faire un dessin.
Consigne : improvisation rapide sur un robinet fuyard...
Pssssshhhh, il court, il court, le robinet ! Au bout de son tuyau, impossible de l'attraper ! Il saute, il danse, il joue à trappe-trappe, et au bout de la course, tout le monde est trempé. Plus vif qu'un serpent, plus malin qu'un renard, le robinet fuyard ne se laisse pas dompter.
2 commentaires:
J'aime bien le robinet fuyard mais je trouve le texte sur le restaurant trop précieux. Il y a de bonnes idées, en particulier sur le contraste entre l'agitation des serveurs et le calme des clients qui sont seuls et qui observent mais le style est trop ampoulé par endroits (c'est le 'concert de crissements de chaises, de tintement de tasses et de froissements de manteaux dans une semi-inconscience' contre la 'sagesse méditative incarnée, les yeux qui voient pour prendre la mesure des choses'. Franchement c'est un peu 'too much' comme les 'pointes de vert olive venant ponctuer l’espace' mais j'aime beaucoup les jeunes femmes éprises de littérature aux cheveux courts et au regard légèrement charbonneux alors je vais laisser glisser pour cette fois !
Ah ha, intéressant, je me demande bien qui tu es. Merci pour ton com en tout cas. J'ai tellement peu l'habitude d'en avoir que je suis passée à côté.
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