06/02/2010

䷄ ATTIRER | ERREUR | GODILLER

Le fleuve coule court déboule le long de son lit-vallée dans un mouvement constant, éternel pèlerin. Il draine et traîne avec lui toute une faune excentrique, colorée, bigarrée, qui parade en cortège comme un cirque ambulant. Mais il est une chose qui n'avance jamais et qui stagne là haut à la surface de l'eau : le passeur sur sa barque qui fait des va-et-vient toujours au même niveau.

Le passeur ne voyage pas. Il est l'étape, le passage, le pont mobile et vivant, il creuse son sillon fluide d'une berge à l'autre, métronome aquatique, toujours égal et disponible. Il godille sans cesse du même mouvement scandé que celui de sa barge allant venant. La terre l'attire puis le repousse, dans une constante indécision, et son pied ne connaît nulle base ferme. Il semble hésiter entre un côté et l'autre, et dès lors qu'il accoste, soudainement pris d'un doute, il comprend son erreur et rebrousse chemin. Il fait le pont entre les contrées et les gens le traversent sur le chemin de leur périple. Il les voit s'en aller loin sur leur longue route mais il ne les suit pas et reste à la croisée des chemins : celui de terre et celui d'eau. Il est le passeur et son destin est d'être entre les mondes, toujours sur le seuil, presque quelque part mais pas encore là, tout au bord d'un lieu, mais jamais nulle part. Il est le passeur et passe tout son temps à faire passer les autres, et passent les journées, et passent les années, il ne peut se passer de son lent va-et-vient.






















Pour ceux que ça intéresse et qui ont des enfants, j'ai une version trait à imprimer pour faire des coloriages.
Demandez-là moi dans les commentaires.

Et un bonus au passage... (attention, il y a du sexe !) :

Le rêve de la femme du pêcheur, Katsushika Hokusai (1760—1849, Japon)

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